Entretien avec Samuel Hercule, interprète et metteur en scène du spectacle Ne pas finir comme Roméo et Juliette

La Cordonnerie c’est la volonté de réunir cinéma, théâtre et musique, pour donner le “ciné-spectacle”. Depuis 1996, la compagnie s’attache à développer ce genre qui leur est propre en s’inspirant de près ou de loin de célèbres contes et histoires. Comme au cinéma, le public suit le film réalisé par la compagnie qui elle, réalise sur scène en direct les bruitages et la musique du film. Aujourd’hui Samuel Hercule, interprète et metteur en scène de la Cordonnerie, nous raconte cette aventure.

Comment est venue l’idée de “ciné-spectacle” ?

C’est difficile de répondre à cette question qu’on nous pose souvent. En fait c’est une évolution sur le long terme. Il y avait une envie d’avoir du théâtre, du cinéma, de la musique et on a réfléchi à comment ces choses pouvaient interagir. Au bout d’un moment la chose s’inverse, c’est à dire qu’on se rend compte qu’on a ces ingrédients, qu’on aime les utiliser, et de spectacle en spectacle on voit comment on arrive à développer quelque chose de nouveau. La chose qui nous intéresse tout particulièrement c’est de toujours se renouveler, de trouver ce qu’on peut réinventer à chaque spectacle.

Pour parler plus spécifiquement des créations que vous présentez, dans quel sens procédez-vous pour imaginer vos ciné-spectacles ?

Ça dépend des fois, ce n’est pas toujours dans le même sens. Par exemple pour Ne pas finir comme Roméo et Juliette, notre dernière création, on avait envie de raconter un amour impossible et dès qu’on pense “amour interdit” ça nous renvoie tout de suite à Roméo et Juliette. Après plus ça va plus et plus on prend des libertés. Je veux dire que ce spectacle est parcouru par endroits de Shakespeare mais ce n’est pas une adaptation de Roméo et Juliette. (…)
Mais en général c’est rarement venu d’une envie très forte d’adapter un ouvrage. Pour Blanche Neige et la chute du mur de Berlin par exemple, ce qui nous plaisait beaucoup à l’inverse, c’était d’adapter ce que tout le monde connait. Retravailler cette histoire connue de tou·tes, et voir comment on pouvait la présenter d’un autre point de vue, du point de vue de la belle-mère. Puis le mur de Berlin a surgi au milieu de cette histoire. Donc ça dépend vraiment des spectacles, on n’a pas de méthode globale, c’est beaucoup de discussions et d’allers-retours.

Vous maitrisez l’art du bruitage à merveille. Est-ce que vous les réfléchissez avant ou après le film ?

Il y a quelques bruitages qu’on prévoit avant. Avec Metilde on a tout le temps les oreilles ouvertes même quand on n’est pas en temps de création, donc il nous arrive de trouver un objet qui nous plait particulièrement et de vouloir l’inclure dans nos spectacles. Parfois on écrit des scènes uniquement pour mettre en scène un bruitage qui nous plait, mais finalement on est les seuls à le savoir, parce que quand on voit le spectacle, on ne se doute pas que ça a été fait pour cet objet-là.

Donc le film dont vous faites le bruitage est projeté derrière vous, mais comment faites-vous pour vous repérer sur la scène et être raccord avec le film ? 

Sur tous les spectacles on travaille avec des rétroviseurs qui servent à des camions. Ils sont assez gros donc on voit tout l’écran et ça permet de jouer face au public. On peut alors faire du post-synchro en direct. C’est quelque chose qu’on a aussi automatisé au fil du temps et qui fonctionne plutôt bien.

Votre dernière création s’intitule, Ne pas finir comme Roméo et Juliette. Pouvez-vous nous en parler un petit peu plus ?

C’est un spectacle qui est plus mélancolique que les précédents, même s’il est quand même très décalé. L’idée qu’on voulait sonder c’était ce groupe dont les médias parlent beaucoup : les invisibles. On se demande toujours qui ils et elles sont et c’est ce qu’on voulait questionner dans ce spectacle, sans faire les donneur·ses de leçons, ce n’est pas du tout ce qu’on défend. On a voulu faire ce spectacle par le biais d’une fable, et sur la forme on a voulu réinventer des choses au plateau, théâtraliser beaucoup plus notre démarche. En fait plus ça va et plus on est mobile, c’est à dire qu’avant on était à nos postes de bruitage et là on est beaucoup plus en mouvement, et dans ce spectacle ça se passe autour d’une table de ping-pong !

 

Propos recueillis par Zoé Kolic pour Artisticrezo

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