Critique de “Je suis tigre”, les 13 et 15 octobre au Escher Theater

Avec Je suis tigre, le Groupe Noces propose un spectacle à mi-chemin de la danse et du cirque, destiné au jeune public, avec une composante graphique importante. Un spectacle intelligent et sensible sur la guerre et l’acceptation de l’étranger.

Comment aborder les thèmes difficiles avec les enfants ? On sait que les tabous et les non-dits ne les protègent pas, que les choses doivent au contraire être énoncées. Le cirque peut-il leur parler de la guerre, de l’exil, de la mort, du racisme ? L’autrice Aurélie Namur et la chorégraphe Florence Bernad ont choisi de répondre par la positive : leur spectacle Je suis tigre, destiné aux 6 ans et plus, confronte son public à tous ces thèmes. Mais il le fait de manière progressive, et par suggestion, ce qui évite d’imposer des images violentes aux enfants. Pour cela, le spectacle met en scène la relation de Marie et d’Hichem, un enfant dont on ne sait d’abord rien à part qu’il vient de loin, et dont on va découvrir le destin tragique.

Pour incarner cette histoire, deux interprètes se partagent la scène. Vêtus de façon banale, ils se rencontrent, établissent une connivence, et se lancent rapidement dans une acro-danse à la fois souple et nerveuse. L’histoire est principalement narrée en voix off, mais les interprètes contribuent à la mettre en images, au-delà de la mise en mouvement, en dessinant sur une grande toile. Sous leur feutre naissent un arbre, les contours d’une maison, la tête d’un tigre, auxquels viennent se joindre des images projetées. Fluide et harmonieuse, la rencontre des langages artistiques permet d’évoquer la tragédie avec pudeur. Quand Hichem décrit sa transformation en tigre, c’est un moment de poésie, en même temps que l’histoire d’un petit garçon qui doit s’endurcir et renoncer à son enfance pour survivre. Cette invitation simple et délicate à la tolérance est tout de même, aussi, un message d’espoir : le récit d’une façon de découvrir la joie malgré l’adversité.

Mathieu Dochtermann, Journal La Terrasse

Accessibility Menu

Font size
Zoom