« La mouche », création du Théâtre des Bouffes du Nord, arrive au Escher Theater

Valérie Lesort et Christian Hecq provoquent le mélange atomique de La Mouche, de George Langelaan, et d’un célèbre épisode de l’émission Strip-tease : téléportation réussie et rire garanti !

De tous les épisodes de la mythique émission de télévision Strip-tease, le plus fameux est « La Soucoupe et le perroquet ». Il raconte les aventures de Jean-Claude, qui construit une soucoupe volante dans son jardin pendant que Suzanne, sa mère, pleure son perroquet mort. Valérie Lesort et Christian Hecq se sont inspirés de ces personnages hauts en couleurs, de leur environnement et de leurs relations pour composer le fond narratif de leur spectacle. On y découvre Odette (toujours géniale Christine Murillo), qui partage sa caravane avec Charlie, la chienne, et vit de la récolte des radis, et Robert, apprenti sorcier foldingue qui met au point, dans le garage transformé en laboratoire, sa machine à téléportation. Malgré quelques égarements spatio-temporels où pointe déjà l’effroi (éventration de Charlie et disparition de la voisine, Marie-Pierre, victime d’une désintégration atomique trop hâtive) les deux premiers tiers du spectacle relèvent d’une farce désopilante et poétique où les trouvailles scéniques rivalisent d’ingéniosité et de cocasserie. Le drame et la gravité viennent après.

Théâtre de rire et d’épouvante
Car Robert, comme le héros de La Mouche, de George Langelaan, découvre trop tard qu’une mouche est entrée avec lui dans la capsule à téléportation et qu’ils ont subi une agglutination moléculaire qui les a confondus en un seul être : Robert est désormais une mouche géante. Comme toutes les mouches, il peut se déplacer sur des surfaces verticales, se nettoyer les yeux avec ses pattes antérieures, il excrète de la salive sur sa nourriture, la prédigère avant de la réabsorber et a un penchant certain pour la charogne décomposée ! Christian Hecq explore avec un éblouissant talent les possibilités de son devenir-insecte et passe avec brio du benêt initial au monstre inquiétant de la fin du spectacle. Prouesse remarquable : l’horreur s’installe progressivement et l’on n’a pas encore tout à fait terminé de rire que l’on commence à frémir de peur. Les comédiens (Christian Hecq, Valérie Lesort, Christine Murillo et Stephan Wojtowicz) sont excellents et réussissent admirablement à faire une tragédie terrifiante de ce qui semblait a priori une farce gore. Valérie Lesort et Christian Hecq transforment brillamment le Grand-Guignol en grand théâtre !

Article de Catherine Robert pour le journal La terrasse

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